La ronce mauve emprisonnait le jardin dans un écrin infranchissable.Une petite porte de bois vermoulu cachée par les hautes herbes, permettait d'accéder au lieu reculé envahi par une végétation sauvage.
En franchissant le seuil d'un pas décidé , j'avançais l'esprit en éveil et les narines palpitantes aux multiples odeurs s'entremêlant dans un air chargé de lumière.
Au loin dans toute cette verdure, un puits, dont la margelle de pierres grises moussues, tel un îlot, accrocha mon regard. Je me rapprochais tout en ralentissant ma marche et restais un instant en suspension, lorsque je vis s'y poser, un beau merle moqueur au bec jaune tournesol qui tout à son aise , s'ébrouait dans un petite flaque d'eau reflétant un pan de ciel . A mon approche il s'envola aussitôt . Je me retrouvais dans le saint du saint , celui de mon enfance. Le presbytère dressait son clocher sous un ciel radieux et un soleil écrasant, sans un souffle de vent.
Je pénétrais en son ombre , calmant les feux de l'été.
La chaleur s'arrêtait au cloître nourricier et laissait ses volutes frémissantes en stries vaporeuses de poussières irisées au seuil de cet antre, cette caverne de
velours noir , ce paradis de langueur diffuse.
Je goûtais avec ferveur les fruits de l'éden, ces petites perles de silence ici et maintenant dans la fraîcheur retrouvée , apaisante comme après une forte fièvre.
Cet espace m'accordait le privilège de me retrouver seule , tranquille et apaisée à regarder dans la pénombre riche de présences invisibles, la lumière dessiner un cadre doré sur le dallage sombre.
Seul le bruit de ma respiration enveloppait le silence....Bientôt il me faudrait rentrer.