Pierre Soulages musée de Grenoble.
Au-delà du noir le plus intime le plus intense naît le silence
Pour révéler le son
Accordé à ma respiration, au regard porté à cette immensité sombre accrochée en lévitation sur ce mur blanc.
Je me suis absorbée dans sa contemplation, ou était ce lui qui est venu à ma rencontre. Tour à tour observatrice observée, seule face au message de l’artiste.
Je me suis rapprochée pour aller à sa rencontre, un instant jusqu’à l’envie d’effleurer sa surface, ses stries fines et infinies plongeant en diagonale pour s’élever à la verticale afin de s’allonger en lignes horizontales au dessus du néant.
Juste passer délicatement la pulpe de mes doigts, unissant mon épiderme à sa surface nervurée pour en lire les messages pour en saisir l’essence. Un instant fragile suspendu à cette idée pour sentir ses variations multiples, entre mes spirales épidermiques et ses quadrillages de matière assombrie.
Progressivement sous le jeu des lumières de la salle, au fur et à mesure de mon éloignement et de mon changement d’angle de vue, il s’est révélé, dévoilant ses mystères. J’ai pris de la hauteur et j’ai vu des champs de blé noir. Le jeu des reflets de brillances, éclairait subtilement la matière, animait sa surface. Immobile face à lui j’ai fermé les yeux pour le retrouver caché derrière mes paupières, image projetée en contre-champs.
Ecran vibrionnant, palpitant, révélant un autre rectangle éblouissant. Le plus lumineux émergeant de l’obscure, unissant la fragilité de la soie à l’ébène la plus dense. Ses éclats de jais se jouent de la lumière de nous et je m’amuse de ces variations subtiles. Au plus profond brille dans l’anthracite le diamant éternel capteur de lumière. Sur son écran j’ai projeté mes films, créé des univers où se côtoient des réminiscences de souvenirs lointains.
La longue chevelure de réglisse lisse d’une jeune japonaise sur le chemin des philosophes à Kyoto.
Les toits d’ardoise luisants après la pluie sous la lumière d’orage d’un ciel tourmenté. La roche brune des orgues basaltiques surplombant les torrents au creux des Cévennes. Subtilement s’est dessiné un espace habité.
Le temps s’est suspendu, étiré dans l’espace et je suis revenue lentement comme on sort d’un rêve profond, encore habité par des impressions diffuses. Apaisée.
Roselyne Cusset (mars 2012 musée de Grenoble)
Noire soeur de lumière...
Modèle Marie Pierre